A quoi ressemble ta vie, ou plutôt tes vies en ce moment ?
Disons à un marathon ! Je fais tourner 3 food trucks - mes « camions qui fument », et 3 restos dans Paris - bientôt 4 : le resto en dur du « camion », le Huabu, ma cantine chinoise sur le boulevard Poissonnière, et le Greenhouse, qui vient juste d’ouvrir dans le 11e à la place de mon ancienne adresse de sandwichs US, Freddie’s Deli.
Pour tout ça, je jongle entre les fourneaux, la création des cartes, la sélection des petits producteurs chez qui dénicher les meilleurs produits, le service, le management des équipes, la gestion… Au Greenhouse, je suis aussi un peu cultivatrice : je m’occupe du potager urbain bio que l’on a installé sur la petite place juste devant la terrasse, dans trois jardinières géantes en brique. Je fais aussi du food consulting auprès d’autres restaurants, chefs ou grandes enseignes de restauration – pour booster leur carte, les coacher sur les tendances, former leurs équipes…Et dès que je peux, je vais donner un coup de main à mon chéri viticulteur en Bourgogne. Sans oublier de suivre le rythme de Mimi, mon chien, qui a encore plus d’énergie que moi.
Pour manger, tu préfères assise ou debout ?
Les deux, évidemment ! Dans tous les cas, je fais attention à ne manger que de bons produits, bio, frais, et de saison. Côté « debout », je suis contente de voir comme les choses ont bougé à Paris depuis 5 ans : avant, la street food, c’était surtout McDo ou Kebab - et manger dans la rue était plutôt mal vu, associé à la malbouffe, à la précipitation, au stress. Maintenant il y a une offre de plus en plus qualitative et créative et c’est tant mieux, parce que pouvoir manger bon et sans perdre de temps, ça compte quand on a des vies ultra-remplies. D’ailleurs, souvent, je n’ai juste pas le temps de manger, ni assise ni debout !
Ah oui ? Parce que c’est comment, une journée avec toi ?
Je ne commence pas forcément hyper tôt, à 8h30, mais quand c’est parti, ça n’arrête plus. D’abord, gestion, compta. Puis j’arrive au resto à 11h, pour régler le service de midi – en ce moment, je me pose au Greenhouse qui est en pleine phase de lancement. A partir de 15 heures, je dois gérer les commandes, les fournisseurs… J’en profite aussi pour avancer dans mes activités de consulting, et si je peux je souffle deux minutes en m’occupant du potager. Et quand c’est possible, je file me défouler à la salle de sport. A 18h, en piste pour le service du soir. Quand on boucle, vers minuit ou après, je retrouve mes amis pour sortir – beaucoup de restaurateurs, parce qu’on a le même rythme.
Tu as fait plusieurs métiers tout au long de ta vie…
Oui. Au départ, pour moi c’était tout sauf la restauration : mes deux parents étaient du métier, à Los Angeles. J’ai passé mon adolescence à bosser comme serveuse ou barista pour me faire de l’argent de poche, du coup pour la suite c’était niet. J’ai étudié la com à San Diego, puis j’ai commencé à travailler dans la banque. J’ai tenu trois ans. Rester dans un bureau, ce n’était clairement pas pour moi. Et j’avais beau lutter contre la tradition familiale, dès que j’avais du temps libre, je rêvais de cuisine. Je faisais le marché, préparais des dîners pour les copines. Alors j’ai sauté le pas.
Et comment s'est passée la suite ?
J’ai choisi la France pour venir me former aux fourneaux. J’ai fait l’école de cuisine Ferrandi, et j’ai commencé à bosser dans des restos étoilés. Après avoir tourné avec plusieurs chefs, il y a six ans, j’ai eu envie de monter ma propre aventure. C’est là que j’ai eu l’idée du food truck : à l’époque, en France, il n’y en avait pas. J’avais tout mon bagage et ma culture californienne - le souvenir de tous les burgers que j’adorais ado !
J’ai pensé qu’un camion serait plus facile que monter un restaurant en dur. Wrong ! Il a fallu d’abord gérer toutes les autorisations administratives pour faire accepter le camion dans Paris, puis basculer très vite sur un mode entrepreneurial hard, recruter massivement…. parce que tout de suite nous avons eu beaucoup de monde, une grosse demande. Et puis voilà, j’ai eu envie de revenir à du « fixe ». Alors j’ai ouvert un resto, puis 2, puis 3, et bientôt 4.