Quel a été ton troisième métier ?
Pendant 1 an, j’ai renoué avec mes premiers amours de journaliste : on m’a proposé d’être chroniqueuse chez Canal + , dans une émission culturelle pour les jeunes. J’étais très contente à l’idée de renouer avec mon passé de “ baby journaliste “ et de faire mes preuves. Et puis finalement, j’ai vite compris que j’étais là juste pour faire joli : tout ce que je voulais éviter. Je ne me sentais pas à ma place, donc j’ai arrêté en fin d’année.
Ensuite, j’ai vécu une période de petit trou noir.
Qu’est ce qui t’est arrivé ?
L’après télévision, le mannequinat en stand by … J’étais au pied du mur, sans activité professionnelle, sans projet, et touchée par le syndrome des “ gens qui rappellent pas “. Evidemment, grosse remise en cause : je n’arrivais pas à m’arrêter sur un projet de vie. Et puis à ce moment là, il y a eu le décès de ma grand mère, Mathilde, atteinte de la maladie Alzheimer. Elle et moi étions nées le même jour. Notre relation était assez étrange et très connectée. Pour faire mon deuil, j’ai eu besoin de faire quelque chose pour parler de cette maladie. Mais pas quelque chose de lourd, car c’est souvent un sujet tabou, que les gens ont du mal à aborder. Alors j’ai eu l’idée de créer quelque chose de frais et ludique : un carnet de coloriage dont les fonds seraient versés à l’association France Alzheimer. J’ai contacté plein d’artistes pour leur demander de faire un dessin au sujet du temps qui passe.
Et tu as reçu des réponses ?
Oui, je n’ai eu que des retours positifs ! Personne n’a refusé : il y a eu David Lynch, Charlotte Lebon, Castelbajac, Coeur de Pirate, Monsieur Chat, mais aussi des artistes pas connus et avec un talent très prometteur. Le carnet a été édité, et a très bien marché, les dons ont été reversés à l’association France Alzheimer et maladies apparentées, dont je suis devenue ambassadrice. Avoir fait ce carnet de A à Z, de l’impulsion de départ au résultat final, ça m’a énormément donné confiance en moi : c’est grâce à ça que j’ai ouvert le café -fleurs.
Quelle est la genèse de ce projet ?
L’associé de mon compagnon se séparait de sa boutique, et comme il savait qu’on avait plein de projets en tête, il nous l’a confiée. Mon compagnon m’a dit : si tu as une idée, fonce, présente là, et on verra si ça marche. Alors j’ai commencé à faire plein de recherches. Je savais que sur le principe de départ ça serait un coffee shop, mais je voulais lui apporter une touche particulière, un truc en plus. J’ai étudié ce qui se faisait à l’étranger. J’ai découvert le concept de café-fleurs et j’ai trouvé ça génial. Il y en a à Vancouver, Amsterdam, au Japon, en Australie, un peu partout sauf à Paris ! J’ai adoré ce concept. Ensuite je suis passée à la phase de création : j’ai fait des recherches sur Pinterest, associé des idées, des images, des mots, et petit à petit j’ai imaginé mon café idéal.
Est-ce que tu t’es entourée ?
Oui, j’ai pensé à un très bon ami à moi, Romain Chirat, qui est DA et qui avait déjà travaillé sur le concept store Empreintes dans le Marais. Il est très doué, il travaille aussi avec Ines De La fressange. J’ai aussi travaillé avec une architecte, Eloïse Bosredon, qui a notamment fait la chocolaterie de Cyril Lignac. On a bossé ensemble sur l’identité du lieu, partant de deux couleurs très végétales : le vert et le rose.
Ensuite il a fallu trouver nos ouvriers, faire les travaux, résoudre les problèmes administratifs. On a eu beaucoup d’aléas ! Au final, le 15 octobre 2016, nous avons officiellement pu ouvrir la porte du Café Peonies !
Comment décrirais-tu ton nouveau métier ?
Je ne dis pas que je suis fleuriste, mais créatrice de bouquets, ce qui est un métier qui n’existe pas vraiment et pour lequel il n’y a pas de diplôme ! J’ai fait une micro-formation de fleuriste, une formation de barista chez Café Coutûme, et j’ai du goût pour les belles choses, En fait, j’ai un peu inventé mon métier sur mesure.
J’aime ce côté terrain, Rungis, puis arriver au café pour préparer mes premiers bouquets et m’occuper de la calibration du café avec la machine.
Quelle leçon de vie tires- tu de toutes ces expériences ?
Depuis que je suis arrivée à Paris, j’ai eu le syndrome de l’imposture dans tous les métiers que j’ai exercés. Je n’avais pas de formation pour ça : ils se sont présentés à moi parce que j’ai fait des rencontres, parce que j’étais au bon endroit au bon moment, mais je me demandais à chaque fois en quoi j’étais légitime de faire ça.
Et puis je me suis rendue compte qu’effectivement, malgré les doutes, c’est en faisant des choses qu’on finit par s’auto-convaincre qu’on est bon dans ce qu’on a choisi de faire. Et que le projet se réalise. Fake it until you do it !