En rentrant en France, par quoi as tu commencé ?
J’ai eu envie de revenir à mes premiers amours : l’écriture, et en particulier le genre épistolaire. C’est comme ça que j’ai eu l’idée de lancer « Lettres d’un inconnu ». Je voulais donner la parole aux gens en leur demandant d’écrire une lettre et de partager une histoire. J’en faisais de belles reproductions que j’envoyais aux abonnés dans de belles enveloppes. J’ai tout de suite eu de super retours de la presse et des milliers de gens se sont abonnés dans le monde entier. Mais comme je ne suis pas du tout à l’aise avec la stratégie financière, j’ai « échoué » financièrement. De manière personnelle, par contre, je l’ai vécu comme une réussite : je ne sais pas où j’en serais aujourd’hui si je n’étais pas allée au bout de ce projet. J’avais besoin de dire ça au monde. Il fallait que je le fasse, c’était nécessaire.
Quelle leçon as-tu tirée de cette expérience ?
J’ai appris qu’il faut faire attention à la partie financière, que l’argent n’est pas sale. J’ai appris que c’est une chance folle de se donner à fond dans un projet, c’est l’occasion de se nourrir de rencontres et de conversations. Et j’ai appris le pouvoir du réseau, des amis qui viennent t’aider à fermer des enveloppes quand tu ne t’en sors plus, qui t’épaulent au quotidien. Ça m’a aussi inspiré un cours que je donne à la School of Life qui s’appelle le plan B. Si le plan A ne fonctionne pas il reste 25 lettres dans l’alphabet. Aujourd’hui, je ne suis pas sûre qu’il faille tout miser sur une stratégie à long terme car 1000 choses peuvent faire que ça ne fonctionne pas. Je pense que c’est une somme de petits pas qui permettent de rebondir, de s’enrichir et surtout d’être en phase avec ce que l’on veut à un moment donné.
Tu as ensuite ouvert la School of Life à Paris en 2014. Qu’est-ce qui t’a motivée à partager tes expériences et à ouvrir cette école ?
Quand j’ai découvert la School of Life à Londres, je me suis dit qu’il manquait un espace comme ça à Paris. Un lieu ouvert où les gens viendraient prendre un petit cours pour se booster et s’inspirer. Et j’aimais bien le côté culturel de ces rencontres car l’aspect « développement personnel » me parle beaucoup moins. Je n’aime pas les « il faut » et les discours culpabilisants. L’idée de la School of Life, c’est d’être une école où l’on enseigne aux adultes tout ce qu’ils n’ont pas appris à l’école : les relations humaines, la confiance en soi, le développement de son potentiel... C’est aussi un lieu qui permet à chacun de rencontrer des gens inspirants et de parler de littérature, de culture et d’expériences, de manière très accessible. On donne des idées et au bout du compte chacun fait ce qu’il veut et ce qu’il peut.
Tu donnes plusieurs cours notamment « les conversations créatives ». De quoi s’agit-il ?
La créativité est un sujet qui m’habite. C’est que qui nous permet de faire ce qu’on a à faire tous les jours de manière différente. Dans le quotidien, on peut tous être créatifs que l’on soit sage-femme, comptable, prof… C’est une façon de s’épanouir, de ne pas s’ennuyer et de ne pas ennuyer les autres. Ça passe aussi par le fait de trouver un but et de trouver du sens, de trouver son WHY comme dirait Simon Sinek. Se connaître soi-même, c’est le travail d’une vie. Je parle d’ailleurs souvent de JK Rowling, l’auteure d’Harry Potter, qui a connu beaucoup d’échecs avant de connaître le succès. Elle dit :«
On ne peut pas véritablement se connaître soi-même, ni éprouver la solidité de ses attaches, si on n'a jamais franchi l'épreuve de l’adversité. »
Moi j’ai connu « l’échec » de Lettres d’un inconnu et j’ai vécu une année difficile suite à la perte de mon meilleur ami. J’ai perdu un pilier dans ma vie mais le fait de le reconnaître et d’en avoir conscience me rend invincible et je me sens forte comme je ne l’avais jamais été. Ça me permet de tout relativiser. Je sais que j’ai la capacité de rebondir, je vais continuer à le faire et je crois vraiment à la notion de sérendipité.
Aujourd’hui, tu gères la School of Life, tu donnes des cours en entreprises, tu écris un livre, comment mènes-tu toutes ces activités de front ?
En ce moment c’est intense, je travaille énormément mais je me sens portée par une énergie car je me sens épanouie dans ce que je fais et ça marche. On vient de déménager la School et il faut que je trouve un nouveau lieu. En attendant, on va donner des cours en mode pop-up dans de super endroits. Quand j’ai su que je devais déménager, la « Fanny-première-de-la-classe » n’aurait pas dormi et aurait cherché un nouvel endroit sans relâche pour emménager tout de suite mais aujourd’hui je me dit «
Everything is gonna be alright ». J’ai eu beaucoup de choses à gérer ces derniers mois donc je vais prendre le temps de trouver le bon lieu au bon moment. C’est ce que la vie m’a appris. Tu peux pousser les murs mais si ce n’est pas le bon moment, il faut prendre le temps.
Quelle est ta définition du bonheur ?
Je suis un peu à contre-courant là-dessus. J’en ai ras-le-bol qu’on parle de bonheur. Le bonheur au travail, la psychologie positive, tous ces livres… Tous ces concepts de bonheur culpabilisent les gens car en réalité personne n’est totalement heureux, je ne connais personne comme ça. Moi je crois aux moments de joie, au rayon de soleil qui te rappelle que la vie est belle. Le bonheur c’est ici et maintenant. Il faut saisir ce qu’il y a à saisir et essayer de contribuer à quelque chose de plus grand que nous.
Quels sont les conseils de vie que tu cultives le plus ?
La citation qui a bercé toute ma vie c'est :
“Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s’habitueront” de René Char. C’est le résumé de ma vie . Je conseille à tout le monde de cultiver son étrangeté, car c'est ce qu'il y a de plus unique et de plus riche en nous. Quand on est jeune, les autres trouvent nos différences bizarres. Quand on grandit, ils les trouvent intéressantes, mais quand même bizarres. Et quand on s'assume vraiment, ils les trouvent géniales ! C'est drôle, non ? Et ce qui est génial, c'est que la société évolue de plus en plus dans ce sens.
Le site de Fanny pour en savoir plus.